L’assassinat du Président Jovenel Moïse, un signe annonçant la disparition de l’Etat en Haïti
À l’image de plusieurs dates de l’histoire d’Haïti, celle du 7 juillet restera à jamais gravée dans la mémoire collective des Haïtiens (nes) car elle marque la triste date de l’assassinat crapuleux de l’ancien Président de la République, Jovenel Moïse. Un an après ce terrible évènement, la justice haïtienne n’arrive toujours pas à faire la lumière sur ce crime odieux. Elle fait plutôt montre de son incapacité à faire triompher le droit et la vérité.
Depuis plus de dix ans, le pays est plongé dans une crise politique et institutionnelle sans précédent, une situation qui sape les principes fondamentaux et régaliens de la démocratie haïtienne. Nous assistons à l’envahissement du banditisme dans toutes les sphères et institutions prestigieuses du pays, au point que l’assassinat d’un Président en fonction ne suscite aucune révolte, ni même l’indignation de la population.
Cet assassinat regrettable ne constituerait-il pas un mauvais précédent pour un Président ou du moins un élu qui voudrait mettre en place un projet de développement favorable à la population ? Qui pourra dissuader les bandits « légaux » déterminés à saper l’autorité lorsqu’un chef d’État se fait assassiner dans son propre domicile ? L’institution policière peine à faire régner l’ordre ou à se tenir debout face aux gangs armés nationaux et transnationaux qui viennent sur le territoire.
Elle est mise à mal par des gouvernants corrompus, des hommes d’affaires et des politiciens qui utilisent le banditisme comme arme politique.
Défenseurs Plus, organisme défendant les droits de la personne humaine voit en ce crime une atteinte à la souveraineté nationale et à la démocratie. Il est inconcevable voire révoltant qu’un Président de la République subisse un tel sort. Ce crime politique, s’il reste impuni, conduira Haïti dans une spirale sans précédent où les voyous à col blanc seront les maîtres de la République et se constitueront en intouchables. Ce qui pourrait condamner définitivement la nation haïtienne au rang des États parias du monde moderne.
L’assassinat de Mr Moïse le 7 juillet 2021, s’ajoute aux multiples meurtres, assassinats et massacres (La saline, Bel-Air, Carrefour-feuilles) qui restent sans suivi et cela prouve une fois de plus la quasi-inexistence du pouvoir judicaire et le règne de l’impunité au pays. Défenseurs Plus dénonce avec la plus grande rigueur le non fonctionnement de l’institution judiciaire et la manque de volonté politique des autorités en vue de l’établissement d’un Etat de Droit démocratique.
Aucun plan, aucune stratégie, aucune politique publique n’est élaborée en vue de mettre un frein à l’insécurité criminelle et le non-respect du droit à la vie en Haïti. La justice pour sa part n’a su apporter des réponses concrètes aux multiples dossiers pendants dans ses tiroirs. Défenseurs Plus croit que les Haïtiens,(nes) partout dans le monde devraient se mobiliser pour forcer les autorités à prendre leur responsabilité face à ce magnicide. Aucun suspect ne doit plus pouvoir entraver l’avancement de l’enquête sur l’assassinat du Président. Quel que soit leur position ou leur lien avec la victime, la justice haïtienne doit pouvoir les interroger et les juger.
Défenseurs Plus exhorte les autorités haïtiennes à travailler pour un retour à l’ordre constitutionnel en renforçant les institutions publiques. L’Etat haïtien a l’ultime obligation de briser le cercle vicieux de l’impunité, d’établir une justice saine, impartiale pour le bien de tous les citoyens et citoyennes.
Antonal MORTIMÉ Co-directeur